Florence Dupré la Tour a rejoint l’an dernier la commission d’attribution des bourses pour les auteurs et illustrateurs du Centre national du livre (CNL). Elle y revendique le même caractère indépendant que ses étudiants lui connaissent. Interview.
Comment avez-vous rejoint la commission d’attribution des bourses aux auteurs et éditeurs de livres du CNL ?
J’y suis entrée sur cooptation. J’ai participé à ma première réunion en juin 2017, à Paris, dans l’hôtel d’Avejan situé tout près du siège de Gallimard. Présidée par un auteur de BD, Baru, elle regroupe une dizaine d’auteurs, de traducteurs, de représentants de maisons d’édition, de directeurs de collection ou de festivals – dont Mathieu Diez, qui dirige Lyon BD Festival.
Nous nous réunissons une fois par trimestre pour examiner près de 100 dossiers : des demandes de bourses de création déposées par des auteurs, ou des demandes d’aides à l’édition, émises par des éditeurs sur présentation d’un devis de publication, lorsque le livre qu’ils voudraient voir soutenu est presque terminé. Il faut savoir qu’un projet d’édition accepté est généralement financé à hauteur de 30 % de ce devis ; la subvention n’est versée qu’après la parution du livre.
Comment traitez-vous les demandes des auteurs ?
En amont de chaque réunion, je reçois de trois à six dossiers. Ils doivent contenir une note d’intention, un résumé du livre, un CV de l’auteur mentionnant ses dernières publications (il faut déjà avoir été publié à compte d’éditeur) et quelques pages de la BD en projet. Le moment venu, chaque membre de la commission présente les projets qui lui ont été remis : nous les défendons, ou nous suggérons de les écarter.
La bourse* est attribuée suivant un vote à bulletin secret. Plusieurs critères entrent en compte : la qualité du projet et sa pertinence, les revenus de l’auteur (y compris le risque de perte de revenus liée au temps engagé pour la création) et, bien sûr, la sensibilité de la commission. Dans nos débats, plusieurs visions de la bande dessinée se confrontent… parfois de manière musclée ! L’évaluation du travail d’un auteur demande une bonne connaissance du milieu de la BD et de la production contemporaine.
Cette expérience à la CNL a-t-elle changé votre approche de la bande dessinée ?
Elle a bien sûr un effet sur ma situation personnelle : je ne pourrai pas déposer de demande d’aide au CNL avant quatre ans, soit un an après la fin de mon mandat. Mais j’ai accepté d’en être membre car l’aspect politique de la démarche m’intéresse. A la CNL, je peux défendre une certaine idée de la bande dessinée. Laquelle, au juste ? Je ne le dirai pas, pour ne pas donner de pistes !
Son dernier livre : Cruelle (Dargaud), 2016
(*) Trois types de bourses à la création sont proposées : bourse découverte (3.500 euros), bourse création (7.000 euros et 14.000 euros), bourse d’année sabbatique de 28.000 euros, accordée une seule fois.
Pour 2018, le budget d’intervention CNL s’élève à 23,6 millions d’euros, dont 2,5 millions d’euros de subventions aux auteurs et traducteurs, et 6,2 millions d’euros d’aides aux éditeurs.
En savoir + sur les bourses CNL aux auteurs et illustrateurs : ici