Quatre Cohliennes fabriquent au studio Parmi les lucioles un court-métrage reconstituant les aventures dessinées en 1943-1944 par les enfants de la colonie d’Izieu. Une campagne de financement participatif a été lancée pour couvrir la post-production de ce film à vocation historique, bientôt présenté en avant-première.
Le matin du jeudi 6 avril 1944, premier jour des vacances de Pâques, deux camions de la Wehrmacht et une voiture de la Gestapo de Lyon font irruption devant la maison de la colonie d’Izieu, ouverte en 1943 sur les contreforts du Jura.
Les Allemands arrêtent les 44 enfants et sept adultes juifs qui s’en occupaient. Tous seront déportés. Absente au moment de la rafle, la directrice de la colonie, Sabine Zlatin, reviendra à Izieu pour réunir les traces de ces jeunes vies fauchées par le nazisme : des carnets, des photos, des dessins. Ses archives réuniront aussi cette incroyable création collective : trois histoires complètes illustrées, conçues comme des films. Assemblées sur des bandes de papier, elles étaient projetées selon le procédé de la lanterne magique, image par image, le soir, à la veillée. C’est à la Bibliothèque nationale de France (BnF) que les originaux sont aujourd’hui conservés. A la Maison d’Izieu, les visiteurs peuvent voir les fac-similés des rouleaux, exposés dans le réfectoire de la colonie.
Septembre 2020. Le directeur du mémorial, Dominique Vidaud, s’interroge sur la possibilité de les animer pour restituer l’intention créative des enfants d’Izieu. Il se tourne vers l’école pour en parler et suggérer que des étudiants de la spécialisation animation s’emparent du projet. Pourquoi pas en stage ? Il faut alors prévoir que les Cohliens soient accueillis et accompagnés par un studio d’animation.
D’une piste de réflexion à deux acteurs, le projet évolue vers un partenariat à trois : le mémorial, l’école, et le studio Parmi les lucioles films, rapidement contacté. Le fondateur du studio, Jérôme Duc-Maugé, et le directeur des productions, François Bernard, participent aux jobs datings de l’école. Présentés à Dominique Vidaud, ils lui proposent le développement d’un premier film dans leurs locaux, à Valence.
La mise en route a lieu à l’été 2021. Deux Cohliennes de 5e année démarrent leur stage de fin d’études de six mois sur l’adaptation d’un récit d’aventures, Ivan Tsarawitch ! : Clélia Ducrocq (spécialisation édition multimédia) et Louise Vialla (cinéma d’animation). Leur mission est complémentaire : Clélia, l’illustratrice, doit se charger d’adapter les dessins des enfants d’Izieu dans un format audiovisuel appropriable pour Louise, l’animatrice. Elles sont accompagnées par Benoît Razy, 1er assistant réalisateur, qui enseigne aussi à l’école.
Pour Clélia, les premières semaines seront l’occasion de s’approprier les bases du layout et de l’animatique. Pour Louise aussi, l’étape des tests est décisive. Elle remarque ainsi que plus elle cherche à rendre son animation fluide et réaliste, plus elle s’éloigne du style graphique des enfants. Elle cherche alors un résultat plus « saccadé ». Elle épure les expressions des visages des personnages. Avec le procédé du faux-fixe, elle crée des tremblements sur des plans fixes qui permettent de jouer sur les rythmes, sans perdre l’intention narrative des enfants.
On retiendra que Clélia et Louise ont été engagées par le studio sans attendre la fin de leur stage. Au début 2022, trois autres jeunes artistes les rejoignent : Etienne Bayeux (école La Poudrière) et deux Cohliennes, Zain Ali (3e année, dans le cadre d’un stage de 2 mois) et Sarah Lavorel, jeune diplômée de la spécialisation animation (promotion 2020). Objectif : les aider à créer, coloriser et animer les dessins intermédiaires, à partir des 74 dessins originaux constituant les images clés du film. Car le film, quant à lui, doit contenir 3.300 dessins !
Entre temps, les producteurs de Parmi les lucioles ont fait entrer en jeu un quatrième acteur : le collège Aimé Césaire de Vaux-en-Velin, dont une classe d’élèves allophones a été formée au bruitage et au doublage par deux techniciens de cinéma. Ces jeunes réfugiés ont effectué les enregistrements à Izieu.
Destiné aux collections de la Maison d’Izieu, Ivan Tsarawitch! sera projeté en avant-première le 6 avril 2022 au mémorial, pour l’inauguration d’une grande exposition sur les carnets, lettres, photos et dessins des enfants d’Izieu. Le film sera ensuite présenté le 13 avril à Paris, lors d’une soirée-événement à la BnF (Paris 6e) qui édite un nouveau livre de documents d’archives ainsi qu’une réédition de l’histoire d’Ivan Tsarawitch. Parmi les intervenants de cette soirée, notre professeur d’histoire de l’art Cyril Devès tiendra une conférence sur les sources d’inspiration des enfants d’Izieu.
Notons enfin qu’une campagne de crowdfunding est en cours pour financer la post-production du premier film et la mise en développement des deux autres histoires dessinées.
Voir la campagne KissKissBankBank pour La Lanterne magique des enfants d’Izieu : ici
Evénements
Exposition « Couleurs de l’insouciance »
Du 6 avril au 6 juillet 2022
Maison d’Izieu
70, route de Lambraz – 01300 Izieu
www.memorializieu.eu
Soirée de lancement « Les enfants d’Izieu »
Le 13 avril 2022
Rencontre, conférence, projection, lectures
BnF François-Mitterrand
Petit auditorium 18 h – 20 h
Renseignements : ici
Publications
« On jouait, on s’amusait, on chantait »
Paroles et images des enfants d’Izieu, 1943-1944
Stéphanie Boissard, Dominique Vidaud et Loïc Le Bail
Editions de la Bibliothèque nationale de France, 2022
Réédition du fac-similé
Histoire d’Ivan Tsarawitch
La lanterne magique des enfants d’Izieu
Editions de la Bibliothèque nationale de France, 2022